Nichées au coeur des Alpilles, sur la route de Saint-Rémy-en-Provence les carrières de lumières nous proposent un voyage immersif aux coeur de l'art et la musique. Ces carrières de calcaire blanc autrefois nommées Carrières des Bringasses et Grands Fonts sont situées aux Beaux-de-Provence. Elles ont été principalement exploité pour la construction du château et de la cité jusqu'en en 1935. C'est en 1959 qu'elles furent remises sur le devant de la scène, grâce à Jean Cocteau qui y effectua quelques séquences pour son film Le Testament d’Orphée.
Le réel succès viendra quinze ans plus tard lors de la visite d'Albert Plécy qui tomba littéralement amoureux des carrières des Grands-Fonds. C'est alors qu'il se lance dans le projet très novateur Cathédrale d'images. Cathédrale d'images profitait du site exceptionnel qu'offrait les Carrières pour diffuser des diapositives géantes d'oeuvres d'arts accompagnées de musiques à thèmes. Aujourd'hui le procédé est toujours le même seule la technique a évolué. Ce ne sont plus des diapositives mais des vidéos qui sont projetées. En 2008 la mairie expulse illégalement la société (Cathédrale d'images) fondée par Albert Plécy pour confier en 2011 la gestion à la société Culturespaces filliale d'Engie, sur fond d'appel d'offre préférentiel, qui rebaptise le site Carrières de Lumières. Et c'est le début de mon expérience avec ce site très impressionant, je regrette tout de même le manque d'informations sur l'époque de son expploitation en tant que carrière de calcaire blanc.
Mesures Coronavirus obligent , nous nous équipons de nos masques et pénétrons dans une pénombre intermitente qui nécessite un petit temps d'adaptation. A l'intérieur la première chose qui m'est venu à l'esprit c'est "immense", on se sent tout petit face à ces gros blocs de calcaire perpendiculaires les uns des autres. Ensuite vient les textures, je n'ai pu m'empêcher de toucher de les surfaces. Lisses et rugueuses à la fois, je sens sous chacun de mes doigts le travail d'excavation à coup de marteau et de burrin. Il y a quelque-chose de puissant qui se détache et qui rayonne à chacune de mes intéractions physiques. Le fait même de déambuler parmi ses mastodontes de calcaire impose la modestie et le respect. Tout est droit, abrupte et saillant laissant entrevoir la dureté de cet environnement, ici pas de place pour les sentiments ni pour la douceur et le réconfort qu'offrent les rondeurs. J'ai l'impression qu'ils sont taillés à l'effigie des hommes qui y ont travaillés toutes ces années. Une roche dure pour des hommes durs, c'est en tout cas l'impression que j'en ai.
Puis ensuite je découvre les projections et là bizarrement je suis moins emballé. Techniquement le rendu est magnifique tout s'accorde parfaitement mais je ne trouve pas l'expérience transcendante. Je m'attendais à quelque-chose de plus immersif, de plus grandiose, à la hauteur de la carrière et de ce qu'elle dégage. Je ne fais que me promener au milieu de vidéos géantes légèrements animées et accompagnées de musique. Rien ne m'a émotionellement bouleversé, pris aux tripes. Toute la projection est restée fade et insipide. Peut-être que le choix des artistes y est pour quelque-chose, cette année le thème s'est porté sur Gaudi et Dali deux artistes qui me laissent très indiférents à vrai dire. Il en aurait peut-être été autrement avec des artistes comme Alan Lee ou Hans Ruedi Giger . Le choix musical m'a déçu, mis à part quelques passages des Pink Floyd dont la musique se marie très bien avec certaines oeuvres de Dali. Je me suis ennuyé tout le long, bien paramétrer mon apareil photo afin de réaliser de jolis clichés m'a plus tenu en haleine que cette projection. Cela n'enlève rien à la prouesse technique et au travail réalisé pour donner vie ses oeuvres. La qualité des images, du son, est indégnable et tout s'emboîte parfaitement. Pouvoir se promener au milieu de ses oeuvres d'arts, les regarder sous des angles que les expositions classiques ne permettent pas est foncièrement unique. Mais il m'a manqué le côté immersif de l'expérience ou peut-être que je n'ai pas su le percevoir. J'ai été plus impressionné et admiratif par la carrière en elle-même que le reste. A l'inverse mon épouse et notre amie elles se sont régalées, émerveillés, elles sont sorties enchantées.
Je m'aperçois que la subjectivité est très importante dans l'apréhension et la découverte d'une oeuvre d'art quelle qu'elle soit. Au final la meilleure reconnaissance pour un artiste c'est que son oeuvre soit vue et partagée, peut importe que l'on aime ou pas, plutôt que de finir seule au fond d'un grenier. Pour finir j'y retournerai surement, mais en sachant à quoi m'attendre, je serai plus sélectif sur le choix artistique proposé et qui sait l'immersion m'attendra peut-être cachée derrière un bloc de calcaire la prochaine fois.
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